En 2015, 1,1 million de réfugiés sont arrivés en Allemagne et quelque 450 000 demandes d’asile ont été enregistrées. La vague actuelle de demandeurs d’asile est la plus importante dans l’histoire de la République fédérale. À la différence de bon nombre de ses homologues européens, le gouvernement allemand – et notamment la Chancelière Merkel qui l’a érigé en priorité de son action – a insisté à la fois sur la nécessité de garantir un accueil digne aux personnes fuyant les guerres au Moyen-Orient et de trouver une réponse européenne à la dimension humanitaire de cette vague dont la gestion défaillante s’est muée en crise politique européenne majeure.
Cet article cherche à saisir la dynamique politique sur la question de l’arrivée des réfugiés en Allemagne et d’en discuter quelques-unes de ses conséquences. Au cours de l’analyse apparaît un déplacement très net dans les enjeux qui dominent le débat public. Dans un premier temps animée par la volonté – portée par une coalition entre le gouvernement et divers acteurs sociaux – d’inscrire les registres d’action dans une perspective d’hospitalité 1, l’Allemagne est désormais préoccupée – sur fond de difficultés de gestion de l’arrivée des demandeurs d’asile par les pouvoirs publics et d’incertitude sur une gestion commune des flux avec les partenaires européens – par la manière dont elle peut réduire le nombre de réfugiés. Ce déplacement est ici analysé comme le passage d’un « épisode 2 » politique à un autre dans l’événement global de l’arrivée en masse des réfugiés depuis 2014. Comment les réponses politiques récentes du gouvernement Merkel – restrictions du droit d’asile et multiplication d’initiatives européennes – s’inscrivent-elles dans le jeu des acteurs nationaux ?