Ce numéro de la Chronique internationale de l’IRES comprend un dossier sur les relations sociales en Suisse et trois articles variés. Le premier article analyse les répercussions des pénuries de main d’oeuvre sur les dynamiques et stratégies de négociation collective au Québec. Malgré un rapport de force apparemment favorable aux syndicats, ces derniers sont confrontés à de nouveaux défis, comme la syndicalisation des travailleurs immigrés, la hausse des attentes de leurs membres en termes de rémunérations ou la montée en puissance des négociations individuelles.
Le deuxième article porte sur la question de l’immigration au Royaume-Uni, phénomène d’ampleur marqué par la forte hétérogénéité des populations concernées. Si le Brexit et la crise sanitaire ont durci les règles des flux migratoires, l’article pointe, sur plus longue période, une contradiction entre des logiques économiques de mobilisation de la main-d’oeuvre d’origine étrangère et des
logiques politiques d’exploitation des réactions xénophobes d’une part croissante de la population.
Le troisième article porte sur le conflit dans le fret ferroviaire aux États-Unis, autour des salaires mais surtout de la qualité de vie au travail, qui a eu lieu à l’occasion du renouvellement de la convention collective de branche fin 2022. Le Railway Labor Act (RLA) de 1926, qui régit les négociations collectives dans le secteur, prévoit une médiation fédérale en cas de blocage. Celle-ci ayant échoué, le Président Joe Biden a demandé l’intervention du Congrès, déniant de fait l’exercice du droit de grève aux nombreux travailleurs syndiqués du secteur.
Ce numéro propose enfin un dossier sur l’évolution des relations de travail en Suisse, qui se caractérise par un rapport de force toujours plus marqué en faveur des employeurs. Trois exemples illustrent cette tendance : l’introduction de la flexibilité du temps de travail dans le cadre de la convention collective de l’industrie suisse des machines, des équipements électriques et des métaux (MEM) ; la possibilité, pour certaines catégories de salarié·es, de renoncer à l’enregistrement de leur temps de travail contre des mesures compensatoires visant à garantir la protection de leur santé ; enfin, l’« amazonification » du secteur de la logistique, contre laquelle des travailleurs précaires du secteur se mobilisent, en dépit de nombreux obstacles.