En quoi les accords-cadres sur l'aménagement et la réduction du temps de travail signés à Air France et EDF-GDF en janvier 1999 témoignent-ils de la diffusion et de la normalisation de la logique contractuelle dans les relations professionnelles au sein de ces entreprises ? Dans le cadre des statuts du personnel accordés par l'Etat au sortir de la Seconde Guerre mondiale, les entreprises publiques ont en effet développé des relations professionnelles atypiques, structurées par la concertation au sein des instances paritaires et dans lesquelles la référence au Service Public fonde le compromis social d'entreprise sur un mode largement communautaire. Ce n'est qu'en 1982 que le législateur offre un cadre légal, étroitement délimité, à la négociation collective au sein des entreprises publiques, dont Air France et EDF-GDF vont faire un usage très différent. Les processus de négociation des accords signés en 1999 permettent ainsi de retracer les trajectoires singulières des relations professionnelles au sein de deux entreprises confrontées, avec une intensité variable, à la libéralisation des échanges et l'ouverture à la concurrence dans l'espace européen. Dans un contexte où le rôle de la logique contractuelle n'est plus contesté et où une configuration syndicale relativement équilibrée ne permet pas la constitution d'un pouvoir de veto, la négociation à Air France s'oriente sur les enjeux socio-économiques de l'ARTT. A l'inverse, compte-tenu notamment de la prégnance du cadre institutionnel des relations professionnelles, avec ses références aux garanties et procédures statutaires, de la configuration syndicales et de la pression de l'Etat, l'accord signé à EDF-GDF s'apparente avant tout à un compromis de nature politique, qui manifeste une relative stabilité des mode de régulation de l'emploi et des relations sociales.