Depuis le début des années 1960 en France, le nombre de retraités pensionnés au titre de l'inaptitude a augmenté, aussi bien en ce qui concerne les salariés des entreprises privées que les fonctionnaires. Ce processus d'exclusion conduit à s'interroger sur le lien entre les exigences de productivité et l'augmentation du nombre de personnes jugées « inaptes » professionnellement dans la fonction publique. Pour comprendre comment se sont formées les représentations de l'efficacité et leurs liens avec la sélection des (in)aptitudes dans une administration particulière, c'est précisément une période fondatrice pour la fonction publique (1946-1948) et ses suites immédiates qu'il convient d'interroger. L'histoire des PTT entre 1944 et 1958 apporte des éclairages. Dans un contexte marqué par l'effort de productivité demandé aux entreprises et à certaines administrations, et où la protection du handicap n'est pas encore intégrée à l'effort de solidarité, les différents types de retrait d'activité professionnelle deviennent un enjeu de redéfinition entre les syndicats, la direction du personnel et le ministère de la Santé publique. La Poste reconstitue un nouveau particularisme face aux tensions entre la demande de productivité et les règles imposées par les ministères de la Santé publique, des Finances et le Secrétariat général à la fonction publique : elle est conduite à être plus sélective que les autres administrations et à poser dès cette époque des problèmes qu'elle retrouvera à partir des années 1980.