Les évolutions du capitalisme vers un régime d'accumulation du capital gouverné par la finance ont entraîné le développement de l'actionnariat des salariés. Le statut d'actionnaire confère alors aux salariés certains droits et prérogatives tels que l'intervention en assemblée générale, la gestion des fonds et la participation à la gestion de l'entreprise. Ces nouveaux pouvoirs liés à l'actionnariat sont donc des pouvoirs indirects qui seront exercés par des représentants. Ces derniers doivent-ils être des représentants syndicaux ? La question est importante car la prise en compte des intérêts des actionnaires par les syndicats n'est pas naturelle, ce qui génère des positions divergentes dans leurs rangs. Par conséquent, d'autres organisations vont se prétendre plus pertinentes car elles se consacreraient à la représentation des actionnaires. Pour les syndicats, il s'agit de s'assurer que l'actionnariat salarié n'affaiblira pas leur fonction de défense des salariés, en détournant ces derniers de préoccupations liées au processus de production.
Cet article propose alors une analyse de l'expérience britannique dans la représentation des salariés-actionnaires afin d'en dégager les principaux enseignements et de mettre en perspective les problèmes de représentation qui se posent en France, où les pouvoirs publics ont institutionnalisé le salarié-actionnaire avec l'espoir de mettre en place une nouvelle régulation dans les entreprises. Mais ce faisant, ils ont renforcé la constitution et la légitimité d'associations de salariés-actionnaires indépendantes, ce qui a intensifié la rivalité entre ces dernières et les syndicats.