Ces dernières années, les heures supplémentaires sont devenues un thème pertinent au sein du débat plus large sur les politiques du temps de travail. Ceux qui opposent politiques de réduction du temps de travail et accroissement de l'emploi se sont intéressés aux relations entre réduction du temps de travail et accroissement des heures supplémentaires.
Pour éclairer la question, cet article développe une analyse quantitative. Il se propose d'établir jusqu'à quel point la réduction du temps de travail est compensée par une augmentation des heures supplémentaires ; et de tester l'hypothèse que cet effet serait suffisamment important pour limiter de manière conséquente l'accroissement de l'emploi.
Afin de mesurer la « substitution » des heures supplémentaires à la création d'emploi, on estime un modèle économétrique de recours aux heures supplémentaires. Ce modèle permet de simuler des expériences de politiques du temps de travail. On utilise les données micro disponibles pour le cas italien, un pays qui à la différence de la France et de l'Allemagne n'a pas encore adopté de politique de temps de travail et où le niveau des heures supplémentaires est extrêmement élevé pour les travailleurs salariés masculins.
On s'intéresse principalement à l'évaluation des effets sur les heures supplémentaires des réductions de la norme hebdomadaire du temps de travail et des changements du salaire horaire. On simule en particulier les effets sur l'emploi d'une réduction d'une heure, appliquée soit à tous les contrats de travail, soit seulement aux salariés qui travaillent plus que 35 heures et qui bénéficient d'une réduction à 35 heures, comme cela s'est fait en France. Ces simulations sont réalisées sur deux hypothèses extrêmes : soit pas de changement dans le salaire horaire, soit compensation salariale totale de la réduction du temps de travail. Les résultats montrent que, en étendant l'analyse à un marché du travail plus réaliste, incluant les femmes et le secteur public, l'effet de compensation engendré par une augmentation des heures supplémentaires est relativement modeste. Le résultat reste solide sur divers modes d'échantillonnage et différentes spécifications du modèle. Cela conforte l'hypothèse que les politiques visant à réduire la norme hebdomadaire de durée du travail peuvent conduire à des accroissements significatifs de l'emploi.