C'est à un véritable renversement de perspective par rapport à ce qu'avaient tenté de faire, en 1988, les artisans du RMI, que nous convie la loi portant décentralisation du dispositif et instituant un RMA. Confirmée depuis par d'autres initiatives gouvernementales, la nouvelle orientation institutionnelle scelle un rapport de forces hostile à une solidarité nationale d'essence redistributive et ne reconnaît plus aux allocataires d'autre droit qu'un minimum vital articulé à des obligations sanctionnées au civil et au pénal. Mais le retour en force de la contrepartie, qui symbolise et matérialise cette évolution, est loin de résoudre le problème de l'(in)employabilité des chômeurs, comme en témoigne une enquête qualitative conduite au moment de la mise en place du RMA dont on présente ici une partie des résultats. L'échec des politiques d'insertion professionnelle et sociale doit beaucoup aux expédients trouvés dans l'identification de déterminants psychiques, personnels, qui auraient été explicatifs du chômage de longue durée. Tout en poussant beaucoup plus loin cette logique, la nouvelle législation prétend y remédier. Or, repenser l'employabilité des chômeurs passe par une autre manière de concevoir le rapport à l'emploi de ceux qui en sont privés.