Dans le domaine social et de l’emploi, l’Europe est partout : les politiques nationales « s’inscrivent dans un cadre communautaire dont elles doivent tenir compte » (IGAS, 2006:3). Mais ce domaine social est lui même subordonné aux institutions et aux orientations économiques de l’Union européenne (UE). Or le projet européen a changé de nature au cours des années 1980. Initialement, il s’agissait de construire un marché unique et de coordonner les politiques sociales nationales, dans le but d’améliorer les conditions de vie. Mais l’adoption de l’Acte unique (1986), du traité de Maastricht (1992) et de l’euro (1999), en instaurant un espace économique unique, vont accroître la compétition entre salariés. Certes, l’Europe essaiera de prendre des orientations plus sociales, avec l’adoption de la Stratégie européenne pour l’emploi (SEE) en 1997, et surtout, avec la Stratégie de Lisbonne (2000). Mais ces procédures non contraignantes ne résisteront ni à la force institutionnelle des traités, de la Banque centrale européenne (BCE) et des ministres des Finances, ni aux retournements conjoncturels. De ce fait, si l’UE possède toujours une stratégie « sociale », la Stratégie « UE 2020 », celle-ci se limite à la réduction de la pauvreté – et non l’amélioration des conditions de vie ni même la réduction des inégalités. La gouvernance économique instaurée à partir de 2011 a radicalisé ces orientations, faisant du salaire l’ennemi de la « compétitivité ».