Ce document est une synthèse du rapport de 348 pages remis en janvier 2018 au BIT sous le titre « L’impact des chaînes mondiales d’approvisionnement sur l’emploi et les systèmes productifs : une comparaison France-Brésil dans les industries aéronautiques et automobiles » 1. Il reprend la trame du rapport et en souligne les principaux résultats. Le chapitre 1 dresse un bilan des approches de la littérature sur les chaînes mondiales d’approvisionnement (CMA) et en propose une définition en termes d’espace à la fois techno-productif, stratégique et de valorisation construit par les grands groupes industriels à partir de leur territoire national. Le chapitre 2 présente l’économie industrielle de l’aéronautique et de l’automobile et identifie les principaux déterminants de l’offre et de la demande dans ces deux secteurs. Il met ainsi en évidence les interactions entre les CMA des groupes de l’aéronautique et de l’automobile et leurs territoires nationaux, et insiste sur l’importance de les distinguer selon qu’ils sont issus d’un pays développé (la France) ou d’un pays émergent (le Brésil). Le chapitre 3 met en évidence le rôle déterminant joué par les politiques publiques dans le développement des deux secteurs, en France et au Brésil. La région du Grand Sud-Ouest illustre dans le cas de l’aéronautique en France les interactions fortes existant entre cette industrie et les institutions publiques régionales, notamment dans la structuration et le soutien financier des activités de R&D mais aussi en matière de formation. Au Brésil, le soutien public à ces deux secteurs passe par les financements de la banque nationale de développement économique et sociale (BNDES) et par les commandes publiques pour l’aéronautique. Le chapitre 4 décrit les transformations opérées dans l’organisation des CMA des groupes de l’aéronautique et de l’automobile dans les deux pays, notamment l’accélération de leur internationalisation. Il met l’accent dans l’aéronautique sur la réduction réalisée par les OEM en France et au Brésil du nombre de leurs fournisseurs devenus responsables de work packages dans le cadre de contrats fondés sur le partage des risques, avec une implication financière croissante des fournisseurs. Dans l’automobile, les constructeurs en France ont choisi d’accélérer l’internationalisation de leur production, par son déplacementcomplet à l’étranger plutôt que par celui de certains segments. Elle s’est faite cependant selon des rythmes et des orientations géographiques spécifiques à chacun des groupes. Les équipementiers français ont aussi contribué largement à la restructuration des CMA, en partie sous la pression des OEM, tout en engageant une stratégie de diversification de leur clientèle et de renforcement de leurs capacités en R&D, leur permettant d’améliorer les rapports de force vis-à-vis des constructeurs.Le chapitre 5 analyse les trois forces de transformations des CMA que sont la mondialisation des activités de production et de R&D et des choix dans le mode d’approvisionnement(maintien en interne ou externalisation), les ruptures technologiques et l’influence croissante des logiques financières sur les stratégie des grands groupes industriels. Le chapitre 6 étudie les effets de ces transformations sur l’emploi et le travail. Il propose un examen comparatif de la situation en France et au Brésil, en croisant les bases de données nationales issues d’Eurostat et celles des groupes concernés. Les trajectoires de l’automobile et de l’aéronautique sont différentes, mais elles indiquent toutefois une même tendance à l’internationalisation des emplois. Toutefois, les enjeux de maintien des emplois en France apparaissent primordiaux dans le cas de l’automobile, et sont au centre des derniers accords collectifs des constructeurs alors que les enjeux de salaire et de préservation du pouvoir d’achat l’emportent au Brésil.
En conclusion, la comparaison des CMA aéronautique et automobile en France et au Brésil montre que les conditions d’upgrading économique et social sont fortement liées aux politiques publiques mises en oeuvre et qu’elles dépassent le seul horizon stratégique des firmes qui en sont parties prenantes. Les transformations en cours des CMA posent la question des relations des grands groupes à leur territoire national, déterminante pour les évolutions de l’emploi et les enjeux de la négociation collective au sein des pays concernés.