Ce rapport questionne la portée et l’effectivité de la négociation collective transnationale d’entreprise (NCTE) d’accords-cadres européens (ACE) ayant pour thème les restructurations. A partir d’enquêtes qualitatives menées dans quatre entreprises transnationales françaises, il s’agit en particulier d’appréhender les formes d’articulation entre les normes définies par les ACE et la régulation collective d’entreprise en France ainsi que les enjeux en termes de normes (les pratiques et les accords collectifs) et d’usage (appropriation par les acteurs). Un premier enseignement se dégage de nos analyses : la compréhension de la dynamique de la NCTE ne peut pas faire l’économie de l’histoire des relations sociales de l’entreprise en France, et notamment celle qui porte sur la mise en oeuvre d’un comité d’entreprise européenne. Les habitudes, les routines de négociation et de discussion adoptées par les acteurs instaurent alors une certaine dépendance au sentier en termes de fonctionnement de cette instance transnationale et sa capacité à produire des accords transnationaux substantiels et effectifs. Un deuxième enseignement suggère que les objectifs poursuivis par les acteurs sont pluriels que la littérature a déjà souligné : 1/ exporter de « bonnes pratiques » en matière de GPEC; 2/ harmoniser les normes et pratiques sociales à l’échelle du groupe ; 3/ définir des règles et procédures de négociation en cas de restructuration ; 4/ renforcer le contrôle sur les directions des filiales ; 5/ redonner une certaine impulsion à la NCTE dans le cadre d’une démarche RSE. Nos analyses montrent que la portée et l’effectivité des accords dépendent tout à la fois de la manière dont les acteurs syndicaux et patronaux s’approprient les ACE ainsi que des modalités de suivi des mesures négociées.