L’ordonnance du 22 septembre 2017 visait une « nouvelle organisation du dialogue social et économique en entreprise » pour « favoriser et valoriser les responsabilités syndicales ». Quatre ans après leur mise en oeuvre effective dans les entreprises, qu’en est-il de ces ambitions ?
L’étude « En quête de dialogue social » apporte de précieux compléments aux évaluations déjà existantes (France Stratégie, Ires…), notamment grâce à une enquête quantitative inédite ayant recueilli 1038 réponses permettant de mesurer plus précisément les effets de la réforme sur les relations sociales en entreprises. Plus précisément, parce que les réponses proviennent davantage d’élu·e·s CFDT de grandes entreprises, titulaires d’un mandat de délégué syndical, agents de maitrise et cadres, l’enquête nous informe avant tout sur les effets de la réforme dans les entreprises traditionnellement les mieux outillées en termes de moyens, de culture et d’expérience du dialogue social.
Quels sont ces effets ? La richesse du questionnaire, auquel s’ajoute celle de plus de vingt entretiens semi-directifs réalisés auprès d’élu·e·s en entreprise, empêche toute caricature. Cependant, il ressort de l’enquête un diagnostic très critique d’affaiblissement de la démocratie sociale en entreprise : qu’il s’agisse des conditions et des modalités du dialogue social, ou encore de celles de l’exercice des mandats et de la représentation des salarié·e·s, la majorité des répondant.e.s à l’enquête déclarent systématiquement une dégradation. Les difficultés se sont aggravées, notamment en raison d’une perte de proximité d’avec les salarié·e·s, d’une tendance à la « professionnalisation » des mandats ou encore de la concentration et de la centralisation du dialogue social et de la négociation collective. Sous couvert de « rationalisation », la réforme a donc surtout conduit à un affaiblissement du dialogue social. Sans correctifs, deux risques majeurs apparaissent alors : l’épuisement des élu·e·s avec un tarissement des vocations, et l’instauration d’un dialogue social « de surface » déconnecté des réalités du terrain.