Quelles sont les incidences sur la structure de l’appareil productif et les qualifications des politiques d’exonération sur les bas salaires ? Telle est la question qui nous avait été posée par le CFDT.
La question étant très vaste et peu explorée, cette étude se veut pour l’essentiel exploratoire. Elle repose sur deux apports : d'une part, une revue de littérature sur l'état existant du savoir et d'autre part, une enquête empirique qualitative, à partir d'entretiens auprès d'acteurs, au niveau des branches et des entreprises.
L’objectif était double : (1) s’efforcer de mieux saisir les usages et les mécanismes à l'œuvre permettant d'éclairer les effets potentiels des exonérations sur les salaires, la formation, les qualifications et plus largement les modes de production ; (2) apprécier dans quelle mesure les représentants syndicaux peuvent exercer un droit de regard sur l'usage de ces exonérations ou du moins en être informés.
La première partie apporte quelques éléments de cadrage et de contexte de la politique d'exonération sur les bas salaires, en revenant notamment sur son déploiement au cours des dernières décennies, et sur ses modalités actuelles. La deuxième partie présente un état des savoirs sur les effets (autres que sur le niveau d'emploi) des exonérations de cotisations sociales. Certains travaux récents apportent des éclairages nouveaux, aussi bien sur la diversité des effets que sur leur contextualisation, par la mise en lumière de la diversité des réponses des entreprises. Dans une troisième partie, nous présentons les résultats de notre propre enquête empirique sur les usages et les effets potentiels des exonérations de cotisations sociales sur les salaires.
Au total, les usages des exonérations bas salaire apparaissent variés et entraînent des conséquences sur les salaires qui peuvent être eux-mêmes hétérogènes, même si pourrait dominer l’effet compression des salaires.
Le premier constat reste celui du déficit d’information et d’une difficulté d’appréhension des exonérations de cotisations sociales au niveau des branches comme des entreprises, avec une difficulté particulière dans les entreprises multi-établissements.
Deuxième constat : il convient de s’interroger sur les formes variées d’optimisation qui peuvent avoir des effets sur les carrières salariales (trappes sous des formes diverses), les relations d’emploi (incitation à l’externalisation) et les formes de rémunération (incitations à développer les composantes défiscalisées et plus largement à contourner l’évolution du salaire de base). Un point essentiel est aussi que par le jeu des prix lié à la concurrence et/ou la position dans la chaîne de valeur, les entreprises qui bénéficient (de par leur assiette masse salariale) des cotisations ne sont pas forcément celles qui profitent de la « manne financière » associée, celle-ci pouvant être transférée en partie ou en totalité à d’autres entreprises.