L’objet de cette étude est de faire un état des lieux de la diversité des modèles et des pratiques managériaux innovants. Les résultats présentés sont issus de données à la fois qualitatives et quantitatives. Les données empiriques qualitatives s’appuient sur un échantillon de 27 organisations.
Certaines d’entre elles, qui ont développé des modèles particulièrement innovants, font l’objet de focus. Les données empiriques issues des 42 entretiens ont été enrichis par 182 retours d’expérience d’acteurs ou agents de terrain sur leur vécu dans un contexte de mise en place d’innovations managériales.
La première partie commence par analyser les enjeux multiples, complexes et pour partie, inédits de ce début de XXI° siècle. Ensuite, elle propose de faire un détour par l’histoire et l’analyse des théories du management, étape indispensable pour évaluer la validité et la cohérence d’un modèle, au risque de ne pas en anticiper les conséquences, les dysfonctionnements ou de ne pas comprendre pourquoi
cela ne fonctionne pas. Il est particulièrement intéressant d’identifier, parmi les différents courants qui se sont succédés, ce qui a constitué a postériori, une réelle avancée dans le monde des organisations et qui représente encore aujourd’hui, les fondations de pratiques actuelles. Dans les revues, ouvrages, boites à outils des cabinets de consultants, certaines pratiques ont le vent en poupe :
le détour vers les fondations du management est indispensable pour répondre aux promesses de performance que ces nouvelles modes managériales laissent sous-entendre.
La deuxième partie retrace la méthodologie d’accès aux données sur les pratiques réelles des organisations, ainsi que la présentation de ces mêmes données. Les informations obtenues sur les innovations managériales menées par les organisations observées sont précieuses afin d’essayer de comprendre les difficultés, les freins, mais également parfois les gisements de créativité, que les analyses théoriques ne permettent pas d’anticiper ou d’évaluer. Les multiples innovations managériales mises en œuvre par les organisations le sont pour des motivations diverses, tantôt objectives, tantôts subjectives, parfois pour des raisons purement économiques, d’autres fois pour
aligner les convictions profondes des acteurs sur leurs pratiques. Par ailleurs, il est très intéressant de remarquer que certaines organisations évoquent une rupture très nette avec les modèles dits « classiques » en remettant en cause les fondements concernant par exemple la division verticale du travail, les hypothèses philosophiques qui sous-tendent les orientations managériales ou encore le rôle
fondamental des managers dans une organisation.
La troisième et dernière partie vise à mettre en perspective la littérature (partie 1) avec les données de terrain (partie 2) dans le but de prendre de la distance, de distinguer à la fois les finalités profondes des innovations, leur potentielle « durabilité » sociale, au-delà d’un probable impact économique positif : ne sont-elles pas le nième avatar des méthodes visant à maintenir, de façon détournée, une
forme de contrôle sur des salariés que l’on invite à toujours donner plus, sans moyens supplémentaires
ou sans marques de reconnaissance. Ou bien prouvent-elles que les acteurs du monde économique et social ont enfin acquis la maturité nécessaire pour faire que nos organisations soient des mondes dans lesquels il fait bon vivre et dans lesquelles l’intelligence collective puisse enfin s’épanouir ? Les innovations managériales du XXI° siècle ouvrent-elles enfin la porte à davantage de démocratie,
réclamée depuis longtemps par les salariés et par les mouvements syndicaux notamment ? La discussion est passionnante et passionnée, mais elle ne fait que commencer ! A vous de la poursuivre !