La crise du logement en France renvoie aujourd’hui pour une grande part à une crise de l’accès au logement social. Cette situation résulte d’une tension inédite sur le parc locatif social : alors que la demande ne cesse d’augmenter, les attributions ont diminué tout aussi inexorablement ces dernières années, conséquence de la baisse de la construction neuve conjuguée à un net affaissement de la rotation dans le parc existant depuis la crise sanitaire du covid 19. Cette crise est également alimentée par l’accroissement des demandes émanant de ménages actifs, l’augmentation de la précarité économique qui touche une partie des salariés ayant tendance à fermer l’accès de celle-ci au parc locatif privé dans les secteurs de marché tendu. Symptôme de ce report de la demande des travailleurs vers le parc locatif social, la moitié des ménages requérants DALO (droit au logement opposable), qui comptent parmi les publics prioritaires à l’accès au logement social, ont des ressources égales ou supérieures au SMIC (Haut comité pour le droit au logement, 2022). La remise en cause de l’accès au logement des travailleurs ne se limite pas au cas français, la plupart des pays européens se trouvant confrontés au même problème au point d’inscrire la question du logement à l’agenda de la commission européenne.
C’est dans ce contexte qu’a été conçu à l’automne 2020 un projet de réforme visant à améliorer l’accès au parc locatif social des « travailleurs essentiels », catégorie d’actifs largement mise en lumière par la crise sanitaire lors du confinement instauré le 17 mars. Cette réforme n’est alors qu’une initiative parmi celles prises par l’exécutif pour tenter de solder la dette contractée par la nation à l’endroit de cette catégorie de travailleurs, qui pendant le confinement ont dû continuer à se rendre sur leur lieu de travail afin d’assurer la continuité des activités indispensables à la sécurité et aux besoins fondamentaux de la population.