Devant la complexité de la notion de paritarisme, ce rapport ne vise pas à retracer l’historique du paritarisme, mais à procéder à un état des lieux du champ paritaire. À travers une démarche de socioanalyse, il s’agit d’interpréter les propos recueillis auprès d’acteurs du paritarisme.
L’objectif est d’apprécier en quoi le substrat à l’intérieur duquel se constituent les expériences de ces acteurs façonne et alimente la manière dont ils vivent et pratiquent à leur manière le paritarisme. Les parties suivantes de ce rapport portent plus précisément sur la vie et les trajectoires des acteurs du paritarisme, leurs pratiques et enfin les modes de défense du paritarisme et les stratégies pour y parvenir.
Le champ paritaire est traversé par de puissants mouvements de fonds et interroge quant à la nature de son devenir, entre déclin et métamorphose. Les acteurs interrogés se sont fait l’écho de ces transformations et des efforts fournis pour dépasser les difficultés. Cet investissement dans la longue témoigne d’un engagement né dans un environnement socio-culturel propice à la production d’une disposition à l’attention aux injustices sociales et, plus largement, à une forme de conscience politique.
Il convient de démystifier l’idée d’une gouvernance axiologiquement neutre, idée que les tenants du réalisme s’évertuent à répandre et qui se confond avec la consolidation de leurs intérêts bien compris.
On voit là tout l’enjeu de la formation syndicale autour de la transmission avec des acteurs clés, vecteurs de mémoire et porteurs d’expériences. La permanence des institutions structurantes dépend alors de l’investissement des militants. Or, le capitalisme néolibéral mine les ressorts de l’engagement au nom de l’idée d’une justice sociale. Les politiques néolibérales encouragent et entraînent toute une série de désajustements. Ce climat n’est propice ni à l’existence de collectifs institués ni à l’engagement dans une cause commune. Ce faisant, les gouvernements (néo)libéraux participent activement à un processus de désaffiliation généralisée de grande ampleur. Et c’est à ce titre que les politiques viennent heurter de plein fouet la raison d’être anthropologique du paritarisme. Les fondements de la rationalité néolibérale expliquent l’emprise que tentent d’exercer les gouvernements néolibéraux sur le paritarisme qui apparaît comme un rempart à l’extension de la logique du marché et aux « réformes ».
Se pose alors l’enjeu de la capacité de résistance. Les affinités idéologiques entre gouvernements néolibéraux et grand patronat conduisent à réduire mécaniquement les marges d’action des représentants des salariés. D’où une certaine ambiguïté du paritarisme dans la mise en œuvre, lorsque les marges d’action des représentants des salariés se réduisent face à une coalition idéologique d’intérêts entre représentants de l’État et représentants patronaux. Les transformations du champ paritaire sont ainsi prises dans ce processus de déconstruction propre à l’histoire du capitalisme.
Vecteur d’affiliations, le paritarisme est plus que malmené par les soubresauts provoqués par ces processus et la dimension anthropologique qui est la sienne ne peut plus être assumée.