Cette recherche ethnographique porte sur le rapport à l'État social, de l’action sociale à l’école, des classes populaires, au sein d’une ville moyenne et des communes alentours dans le département du Gard, à savoir un territoire « en crise », fortement paupérisé et inégalitaire. L’étude aborde le rapport aux aides sociales et à l’assurance chômage dans un contexte de rationalisation budgétaire et de territorialisation de l’action sociale, avec une attention spécifique au genre. Appréhender le rapport aux services publics de manière localisée nécessite une attention à la matérialité du territoire, à savoir au marché du travail, aux conditions d'accueil aux guichets et à la trajectoire professionnelle des classes populaires, et en particulier des femmes. La dégradation du marché de l’emploi, dans un contexte de désindustrialisation du fait de la fermeture des mines de charbon sur le territoire étudié induit un recours nécessaire aux aides sociales. A la différence d’autres institutions de la main gauche de l’État, l’école reste une institution stable d’encadrement social des classes populaires, tant par rapport aux formations proposées qu’en tant que potentiel employeur, dans le contexte où l’administration publique représente plus de 60% des emplois dans certaines communes. Pour les femmes de classes populaires, devenir assistante d’éducation (AED) ou accompagnantes d’élèves en situation de handicap (AESH) permet la reconnaissance des diplômes, peu pris en compte dans l’espace local, et une relative ascension sociale. Ces métiers restent précaires, peu reconnus et s’inscrivent dans la continuité d’un précariat au féminin. Ces « petites mains » de l’éducation nationale représentent une main d’œuvre féminine bon marché et permettent de répondre à des besoins qui ne dépendent pas strictement de l’enseignement. Les tensions que connaissent ces professionnelles sont à relier aux besoins des familles populaires et élèves en situation de décrochage scolaire, en fonction des inégalités territoriales.