Dans le débat économique et politique actuel, le coût du travail fait l’objet d’une attention continue. Toutes les raisons paraissent bonnes aux économistes libéraux pour demander sa baisse. Pourtant, il ne s’agit après tout que de l’un facteur parmi d’autres, dans la formation des coûts et des prix. Et par ailleurs, le coût du travail est aussi le reflet du pouvoir d’achat et de la prospérité d’un pays…
En 2013, à l’initiative de la CGT, une première étude macroéconomique avait analysé, sur longue période, le comportement du capital, en comparant le coût du capital (prélevé par lui pour rémunérer ses apports passés à l’entreprise) et l’investissement productif (consacré à la préparation de l’avenir).
Cordonnier et alii (2013) avaient alors constaté que la part des profits consacrés à l’investissement avait fortement baissé à la fin des années 1970, à l’occasion des crises pétrolières ; puis qu’elle était restée basse pendant la période de désinflation compétitive et des politiques de rigueur visant la reconstitution des marges des entreprises. A l’inverse, la part des profits distribués en dividendes avait beaucoup augmenté. La reconstitution des marges des entreprises avait alimenté les dividendes et les frais financiers, et non pas relancé l’investissement. Ils en avaient déduit que le capital exerçait un surcoût croissant, qu’il faisait peser sur les entreprises et sur l’économie.
Distinguant capital économique et capital financier, Cordonnier et alii (2013) avaient calculé un indicateur de surplus du capital financier, mesurant l’excès de coût du capital. Cet indicateur estimait un surcoût du capital compris entre 50 % et 90 % du coût du capital réel sur la période 1987-2011, en très forte augmentation par rapport à la fin des années 1970.
En 2014, la CGT a souhaité poursuivre cette analyse, en observant la réalité de ce surcoût du capital, sur la période de crise 2008-2014 (crise financière dite de Lehman Brothers en 2008 ; crises monétaires et bancaires de 2011). Mais surtout, la CGT a souhaité que cette analyse se mène au plus près des entreprises et de leurs salariés. Dans les entreprises françaises, comment le capital s’est-il comporté durant la crise ? A-t-il allégé son coût ? A-t-il répondu à la crise par des investissements d’avenir ? Ou, au contraire, a-t-il maintenu son prélèvement, pesant dans ce cas comme un surcoût au regard des besoins des entreprises, des salariés, et de l’économie réelle ?
C’est le sens de l’étude commandée par la CGT à SECAFI, menée sur un échantillon profond de 23 000 entreprises représentant deux millions de salariés et 570 milliards d’euros de chiffre d’affaires.