Comme en témoignent des études récentes dans des domaines aussi variés que la géographie, le droit ou encore les relations professionnelles et internationales, nous assistons aujourd'hui à une diversification des lieux de la régulation sociale impliquant une nouvelle juxtaposition des espaces locaux, nationaux et transnationaux. Si ces différents espaces de régulation ont longtemps été considérés comme s'opposant les uns aux autres, les récents travaux sur la gouvernance multi-niveaux reflètent une réalité plus complexe qui se caractérise plutôt par des interactions diverses et un enchevêtrement de ces espaces. Reportée au monde syndical, cette réalité confronte les organisations de représentation des travailleurs à des défis importants, dont celui d'apprendre à concilier ces nouveaux agencements et d'en faire émerger les complémentarités potentielles, comme en témoigne la formation nouvelle de « réseaux syndicaux transnationaux » ou d'« alliances syndicales internationales » au sein des entreprises multinationales. Leur objectif est généralement d'assurer et de consolider les droits syndicaux dans ces différents pays, de coordonner les activités syndicales des affiliés grâce notamment aux échanges réguliers d'informations ainsi qu'à ouvrir un espace de dialogue et de négociation au plan international avec les directions de ces entreprises. Partant de ce contexte, cet article vise d'abord à offrir une analyse théorique de l'enjeu de la diversification et de l'enchevêtrement des lieux de la régulation pour l'acteur syndical, puis, à partir d'une perspective plus empirique, de mettre en exergue la pertinence des alliances syndicales internationales face à ce nouveau phénomène en relatant l'expérience particulière des syndicats d'une multinationale canadienne dans la mise en place d'une telle alliance baptisée le « Réseau UNI@Quebecor World ».